Les festivals en Normandie

Auteur : Pierre Guillemin


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D’après un recensement croisé dans les presses locales et régionales ainsi que sur les sites officiels et réseaux sociaux des festivals de musique, on en dénombre 53 en Normandie en 2017. Le Calvados et la Manche arrivent en tête avec 12 festivals chacun, suivis par l’Orne (11), la Seine-Maritime (10) et l’Eure (8). Au palmarès des festivals de musique dépassant les 11 000 entrées payantes en 2017 (seuil minimal d’une cartographie des festivals du Grand-Ouest parue dans Ouest-France le 1er septembre 2017), la Manche fait mieux que ses voisins normands. Avec les Papillons de Nuit (68 000 entrées), Jazz sous les pommiers (37 500), Jazz en baie (16 000), Chauffer dans la noirceur (15 000), Les traversées de Tatihou (14 000) et Les rendez-vous soniques (11 700), elle devance de cinq festivals l’Eure (True Normand - 12 000) et l’Orne (Art Sonic - 20 000), de quatre le Calvados (Beauregard - 65 000 - et Nördik Impact - 23 500) et de deux la Seine-Maritime (Archéo Jazz - 16 000 - et Ouest Park - 15 000).

En Normandie, au-delà de la surreprésentation des musiques actuelles, le rock est le genre dominant, avec 14 festivals, si l’on considère ses différentes déclinaisons : pop-rock (5), rock-électro (4), rock (4) et rock-métal (1). Les musiques savantes sont aussi bien représentées avec 6 festivals de musiques sacrées et/ou traditionnelles et 5 festivals de jazz. La diversité des genres artistiques fait donc coexister musiques populaires et musiques savantes. Pour ces dernières, les organisateurs manifestent un souci d’accessibilité sociale visant la démocratisation de pratiques culturelles connues pour être distinctives : entrées allant de 4 à 20 € pour l’écoute de musiques savantes ou sacrées, concerts de jazz gratuits dans l’espace public coutançais.

Au-delà de l’affluence et de la diversité musicale, par leur rayonnement parfois international, par leur longévité (10,7 éditions en moyenne), par leur maillage, ces festivals assurent une animation culturelle régionale importante, du mois d’avril au mois de décembre. De la baie du Mont-Saint-Michel à la côte d’Albâtre, des bocages ornais et manchots au pays d’Ouche, des scènes éphémères s’invitent pour un jour, une, deux voire trois semaines, dans des paysages tantôt urbains tantôt ruraux. Ces événements culturels s’approprient différents espaces. Dans la Normandie agricole, les champs sont mis à contribution mais les fermes sont aussi revisitées (Du bruit dans les longères), parfois dans l’objectif d’une mixité générationnelle fidèle à l’esprit du label Accueil Paysan (La Ferme k’on écoute). Les organisateurs festivals privatisent aussi des lieux parfois renommés (le Mont-Saint-Michel et sa baie) ou investissent des espaces en déprise (une gare désaffectée). Ces deux derniers exemples renvoient à différents types d’organisation. Les festivals peuvent être portés par des associations (Acad’habra pour La G’art en fête ), ou des opérateurs privés (Bayard Presse pour Via Aeterna). La Manche, terre de festivals, a d’ailleurs accueilli en 2018 un séminaire des managers de sociétés qui assurent la technique des plus gros festivals français, parmi lesquels on retrouve Beauregard ou les Papillons de Nuit.

Outre la musique, la Région Normandie bénéficie d’une offre festivalière variée. Le cinéma n’est pas en reste avec Honfleur tout court ou le Festival du cinéma russe à Honfleur, le Festival international du film culte et les Off-courts à Trouville-sur-Mer, le Festival du cinéma américain à Deauville, le Festival du film européen à Houlgate, Les journées romantiques de Cabourg ou encore Les Egaluantes autour de Carentan. Les arts de la rue animent aussi la Normandie avec 11 festivals dont La Fête du cirque à Saint-Romain-de-Colbosc, Viva Cité à Sotteville-lès-Rouen, Côté cour-Côté jardin à Bernay, les Virevoltés à Vire ou encore Sortie de Bain à Granville… Dans l’Orne, c’est l’humour qui est à l’honneur avec les Andain’ries à Bagnoles-de-l’Orne et la région dispose aussi d’une offre de festivals pluridisciplinaires avec Femmes dans la ville à Cherbourg-en-Cotentin, Pluri’Elles autour de Lessay ou les Hétéroclites à Saint-Lô, et bien sûr, Les Boréales qui rayonnent dans la région depuis Caen.

Après les financements historiques de la décentralisation culturelle vers la Province (déconcentration en fait), l’Etat se désengage aujourd’hui de certaines politiques culturelles dans le cadre de la décentralisation territoriale. Les dynamismes festivaliers différenciés confèrent ou non aux départements des sortes d’avantages comparatifs pour capter des financements régionaux dont les faveurs pourraient aller à la festivalisation des politiques culturelles, dans un contexte de concurrence territoriale accru. En effet, dans le cadre de la restructuration du service culturel de la Région Normandie, le désengagement du financement de concerts gratuits à Rouen se traduit par exemple en 2018 par une augmentation de 313 000 euros d’une enveloppe destinée à financer notamment les festivals. L’avenir des plus petits d’entre eux passera aussi par le soutien des intercommunalités élargies, que la Région Normandie souhaite voir contribuer davantage l’événementiel culturel. Les festivals normands le méritent alors que trois d’entre eux ont été primés lors des Festivals awards des éditions 2017 (90 000 votants à l’échelle nationale). Art Sonic a remporté le trophée du meilleur petit festival, le Biches Festival celui de la plus belle affiche et les Papillons de Nuit celui de la meilleure communication web.


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