L'accès au soins et aux soignants permet de rendre compte de l'offre des territoires en matière de services à la population. Les structures médicalisées dépendent de la présence en nombre de praticiens, souvent spécialisés et de personnels para-médicaux. Le maintien de services de santé de qualité en milieu rural est un enjeu fort de la politique d'aménagement des territoires et à l'échelle de la Normandie, le premier constat, et non des moindres, est que l'offre médicale se situe bien en deçà des moyennes nationales. La faible densité de personnel médical ou para-médical est une des caractéristiques forte de cette géographie de l'offre de soins en Normandie. Elle s'observe quelle que soit la spécialité ou la profession exercée. Elle conditionne fortement l'accès au soins et la répartition des structures hospitalières au sein même des territoires.
La région compte 12 754 médecins au total, soit 252 praticiens pour 100 000 habitants alors que la moyenne française tourne autour de 337 médecins omnipraticiens, spécialistes libéraux ou salariés.
La région compte quelque 2 961 médecins-omnipraticiens libéraux, c'est-à-dire des médecins généralistes, soit une densité de 89 médecins pour 100 000 habitants. Répartis sur l'ensemble de la Normandie, ils se concentrent toutefois dans les trois grandes métropoles. Il faut ajouter à ces médecins libéraux, 3 835 médecins qui sont salariés d'une structure hospitalière en 2014. Dans l’hexagone, le rapport est de 155 médecins omnipraticiens pour 100 000 habitants.
Ces manques de praticiens engendrent des délais d'attente importants, les salles d'attente ne désemplissent plus, les surcharges de travail et les horaires à rallonge deviennent le quotidien des médecins et des soignants et la recherche de remplaçants relève bien souvent du parcours du combattant. On ne peut réellement parler de désert médical de façon générale, mais les praticiens sont nettement en sous-effectif, et plus encore si on s’attache à observer la répartition des spécialistes.
Avec 1 632 spécialistes (cardiologues, gynécologues-obstétriciens, urologues, psychiatres...), la Normandie compte seulement 49 spécialistes pour 100 000 habitants. Prenons l'exemple des pédiatres : au niveau français le rapport est de 64 spécialistes pour 100 000 habitants, en Normandie ce même rapport est de 2 pour 100 000.
Ces chiffres illustrent les déficits notoires en matières de spécialistes dont souffre la région. Le constat est identique au niveau des professions para-médicales.
La Normandie compte 19 393 infirmiers ou infirmières répartis pour les 4/5 d'entre-eux en milieu hospitalier et donc salariés d'un établissement de soins. Pour les 3 089 restants en milieu libéral, le rapport est de 581 infirmiers pour 100 000 habitants alors même que la densité de cette profession dans l'hexagone est presque du double (967 infirmiers pour 100 000 habitants). Il faut ajouter à ces infirmiers et infirmières libéraux 12 700 aides-soignants assurant les soins de suivis à domicile et en structures médicalisées
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La géographie de cette profession révèle une répartition calquée sur la structure même de la population, les concentrations de soignants correspondant aux territoires affichant un niveau de vieillissement important. On les retrouve ainsi en bordure des littoraux, sur les côtes du Calvados et le long de la côte ouest du Cotentin. On observe également une forte concentration dans les grandes villes, où la clientèle est potentiellement plus importante, c’est le cas particulièrement au Havre.
À ce personnel paramédical, il faut ajouter les 2 155 masseurs-kinésithérapeutes répartis sur le territoire normand, soit un rapport de 65 pour 100 000 habitants, un rapport très inférieur au niveau français établit à 127 masseurs-kinésithérapeutes pour 100 000 habitants. Ils sont surtout présents dans les grandes villes, Caen, Rouen, Le Havre, Cherbourg, Évreux, Alençon, Saint-Lô ou Granville.
Si l'on considère une autre profession libérale comme celle des chirurgiens-dentistes, on observe de fortes concentrations en zones urbaines mais plus généralement une couverture relativement homogène de cette profession sur l'ensemble de la Normandie, exceptions faites du nord-est de la Seine-Maritime et du nord de l'Orne. Pourtant, avec seulement 1 192 chirurgiens-dentistes en 2015, le rapport est de 36 praticiens pour 100 000 habitants. Il est de 63 au niveau français.
Les écarts observés entre les densités nationales et régionales révèlent une situation très déficitaire de l’offre de soins et de praticiens au niveau régional. Cette situation très défavorable en premier lieu pour les patients est encore plus exacerbée dès que l’on observe les densités dans le corps des médecins spécialistes.
Qu’il s’agisse des cardiologues, des dermatologues, des gastro-entérologues ou des ophtalmologistes, les densités de spécialistes sont très faibles. Ils se localisent principalement dans les grandes villes et métropoles de la région. On compte 5 900 ophtalmologistes en France en 2015, soit 9 praticiens spécialistes pour 100 000 habitants, ce rapport est de 7 en Normandie. C’est là un résultat proche de la moyenne française qui dénote au-delà du déficit normand, un déficit français réel de cette spécialité. Dès lors, le faible nombre de spécialistes installés en milieu libéral allonge les délais d’accès des patients aux consultations et aux soins.
Prenons, l’exemple des cardiologues : avec seulement deux cardiologues pour 100 000 habitants, une nouvelle fois la pénurie de spécialistes est criante en Normandie, d’autant plus qu’une grande partie de ces spécialistes se localisent dans les grandes villes, et dans les deux départements du Calvados et de la Seine-Maritime.
Cette rareté de soignants est une réelle faiblesse pour la région. C’est d’autant plus préoccupant que la Normandie va connaître dans les prochaines années, et c’est d’ores et déjà le cas, un vieillissement important de sa population, donc un besoin de soins a priori plus important.
On ne peut pas parler réellement de désert médical, même si certaines zones de la Normandie sont clairement en sous-effectif et que de vraies disparités existent entre territoires. En matière d’équipements et de structures d’accueil, des efforts sont également nécessaires. La redéfinition de la carte sanitaire par les agences de santé régionale et la logique de rentabilité des services de santé
La Normandie compte 218 établissements dont 81 pour des courts séjours, 112 pour un accueil de moyen séjour et enfin 25 pour de longs séjours. Ces établissements de soins offrent
12 475 places auxquelles s’ajoutent environ 700 places dédiées à l’hospitalisation à domicile.
Parmi ces établissements, la région compte deux CHU-CHR et des hôpitaux locaux dans les plus grandes villes de Normandie. A ces établissements conjuguant soins et enseignement-recherche s’ajoute un centre réputé de lutte contre le cancer à Caen.
Face aux besoins de la population, le rapport entre lits ou places disponibles dans les établissements de soins et population totale s’établit à 3,7 places pour 1 000 habitants. En France en 2013, ce même chiffre de densité est de 6,3 places pour 1 000 habitants. La région au regard de ces chiffres est donc sous-équipée. Le développement de l’hospitalisation ambulatoire est une voie assurément à développer et à encourager plus encore pour pallier les déficiences et les disparités territoriales.
629 établissements accueillent aujourd’hui des personnes âgées en Normandie et proposent 11 549 lits. Ces établissements sont soit des maisons de retraite, soit des foyers logements proposant des hébergements permanents adaptés à la dépendance.
Face à l’insuffisance évidente des structures d’accueil au regard des chiffres du vieillissement à venir, de nouvelles pistes doivent être envisagées, dont principalement le maintien à domicile. Les délais d’attente our obtenir une place en structure d’accueil s’allongent tout comme s’allonge la durée de vie et comme recule l’âge de la dépendance. La Normandie dispose d’ores et déjà de 126 services de soins à domicile, lesquels services offrent plus de 6 000 places aux personnes âgées dépendantes. Les efforts doivent être prolonger et de nouvelles façons de penser la fin de vie imaginées.